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Le liquidateur du donataire peut demander au donateur de renoncer à une clause d’inaliénabilité

Cass. 1e civ. 19-12-2018 n° 17-17.551

En cas de donation d'un bien avec clause d'inaliénabilité, le liquidateur judiciaire du donataire ne peut pas demander la mainlevée d’une inaliénabilité conventionnelle à la place du donataire ; mais il peut valablement demander au donateur de renoncer à la clause.

Les clauses d'inaliénabilité affectant un bien donné ne sont valables que si elles sont temporaires et justifiées par un intérêt sérieux et légitime ; même dans ce cas, le donataire peut être judiciairement autorisé à disposer du bien si l'intérêt qui avait justifié la clause a disparu ou s'il advient qu'un intérêt plus important l'exige (C. civ. art. 900-1, al. 1).

Des parents font donation à leur fille d'un immeuble avec interdiction pour elle de le vendre sauf avec leur consentement. Leur fille est mise en liquidation judiciaire et le liquidateur obtient l'accord des donateurs pour renoncer à la clause d'inaliénabilité et sollicite du juge-commissaire l'autorisation de vendre l'immeuble.

Une cour d’appel rejette la demande du liquidateur en retenant que la mainlevée d'une clause d'inaliénabilité n'appartient qu'au donataire, de sorte que le liquidateur n'était pas fondé à solliciter des donateurs une renonciation à cette clause à la place de la donataire, ni du juge-commissaire l'autorisation de procéder à la vente du bien donné.

Après avoir rappelé les termes de l’article 900-1, al. 1, la Cour de cassation censure l’arrêt : le liquidateur s'était borné à solliciter des donateurs la renonciation à la clause d'inaliénabilité, sans agir en mainlevée de celle-ci.

A noter : En ce qu'elle est subordonnée à des considérations personnelles d'ordre moral et familial inhérentes à la donation, l'action en autorisation judiciaire d’aliéner un bien donné avec clause d'inaliénabilité, qui est prévue par l'article 900-1 du Code civil, est exclusivement attachée à la personne du donataire (Cass. 1e civ. 29-5-2001 n° 99-15.776 ; Cass. 1e civ. 8-3-2005 n° 03-20.968). En conséquence, cette action ne peut pas être exercée par un créancier du donataire agissant par voie oblique (Cass. 1e civ. 8-3-2005 précité) ni, lorsque le donataire fait l’objet d’une procédure collective, par le mandataire judiciaire ou le liquidateur judiciaire (Cass. 1e civ. 29-5-2001 précité ; Cass. 1e civ. 3-4-2002 n° 98-21.097 ; Cass. com. 9-11-2004 n° 02-18.617). 

Au cas particulier, le liquidateur de la donataire n’avait pas sollicité en justice la mainlevée de l’inaliénabilité conventionnelle, ce qu’il ne pouvait pas faire, mais avait demandé aux donateurs de renoncer à l’inaliénabilité, cette possibilité étant prévue expressément dans l’acte de donation. L’arrêt de la cour d’appel est censuré pour avoir confondu demande de mainlevée par le donataire et renonciation à l’inaliénabilité par le donateur. La Cour de cassation affirme ainsi l’existence de deux causes de suppression de l’inaliénabilité conventionnelle, chacune ayant son propre régime.