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SAS devenue unipersonnelle : l'associé peut révoquer le président sans respecter les statuts

Communication Ansa, comité juridique n° 19-006 du 6-2-2019

L’associé unique de société par actions simplifiée devenue unipersonnelle peut décider unilatéralement de révoquer le président, même si les statuts imposent une révocation par une assemblée générale convoquée par le président.

Les modalités de révocation du président de société par actions simplifiée (SAS) sont, dans le silence de la loi, librement fixées par les statuts.

Il arrive fréquemment que les statuts de SAS prévoient que la nomination, la révocation et la fixation de la rémunération du président sont décidées par les associés réunis en assemblée générale et que le président est compétent pour convoquer l’assemblée générale.

Si tel est le cas et que la SAS devient unipersonnelle (Sasu) sans modification corrélative des statuts, l’associé unique peut-il décider unilatéralement de révoquer le président ?

Oui répond l’Association nationale des sociétés par actions (Ansa) : il ne saurait y avoir dans une Sasu de convocation de la collectivité des associés, d’assemblée générale ou de procès-verbal d’assemblée ; l’associé unique prend des décisions, sans être convoqué par un quelconque organe social. Cette solution est confirmée par l’article L 227-9, al. 3 du Code de commerce qui indique que l’associé unique ne peut pas déléguer ses pouvoirs et que ses décisions sont répertoriées dans un registre.

La spécificité de la société unipersonnelle permet de réinterpréter ou de ne pas appliquer les dispositions des statuts rédigées pour une société comprenant plusieurs associés et non un seul.

Une telle solution a d'ailleurs déjà été adoptée par la Cour de cassation à propos d'une SARL devenue unipersonnelle et dont les statuts prévoyaient la convocation des associés par le gérant ou par un ou plusieurs associés après mise en demeure du gérant : si la société ne comporte qu'un associé, celui-ci est habile à révoquer le gérant non associé en lieu et place de l'assemblée générale des associés par une décision unilatérale (Cass. com. 9-3-2010 n° 09-11.631).

A noter : Cette solution peut, à notre avis, être étendue à toutes les décisions qui, selon les statuts, sont prises en assemblée générale convoquée par le président : si la SAS devient unipersonnelle, les décisions peuvent être adoptées par l'associé unique. En effet, toutes les clauses des statuts impliquant plusieurs associés sont écartées puisqu'elles ne peuvent pas être exécutées.

Le risque de conflit entre l'associé unique et le président est le plus important en matière de révocation car il est peu probable que le président consente à convoquer lui-même les associés afin qu'ils mettent fin à son mandat. Confrontés à un tel refus, les associés de SAS pluripersonnelles doivent demander en justice la désignation d'un mandataire chargé de convoquer la collectivité des associés afin de statuer sur la révocation du président (pour un exemple, Cass. com. 25-3-2014 n° 13-16.089). L'interprétation retenue par l'Ansa permet donc à l'associé unique d'échapper à cette formalité.

La décision de l'associé unique reste néanmoins soumise au respect des principes propres à la révocation des dirigeants : elle ne doit pas intervenir dans des circonstances injurieuses ou vexatoires ; le président doit être informé des motifs de sa révocation et être en mesure de présenter ses observations avant la décision.

En outre, à notre avis, les dispositions statutaires qui déterminent les causes de la révocation du président (par exemple, une révocation pour juste motif ou pour motif grave) continuent de s'appliquer en cas de passage d'une SAS pluripersonnelle à une Sasu. Pour éviter les litiges, les rédacteurs des statuts de SAS, comme de SARL, ont intérêt à envisager par avance et explicitement les conséquences du passage à la Sasu, ou à l'EURL.