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L’employeur doit-il rompre par écrit un CDD de remplacement sans terme précis arrivé à terme ?

Cass. soc. 18-9-2019 n° 18-12.446 

L’employeur n’est pas tenu de notifier par écrit au salarié sous CDD conclu sans terme précis pour le remplacement d’un salarié malade la rupture du contrat arrivé à son terme en raison du licenciement de ce dernier pour inaptitude physique.

Dans certains cas, un CDD peut ne pas comporter de terme précis. Il en est ainsi lorsqu’il est conclu pour le remplacement d’un salarié absent. Le contrat est alors conclu pour une durée minimale et a pour terme la fin de l’absence de la personne remplacée ou la réalisation de son objet (C. trav. art. L 1242-7).

La fin de l’absence du salarié remplacé correspond soit à la reprise d’activité de ce dernier, soit à sa cessation définitive d’activité. Elle entraîne la rupture de plein droit du CDD (Cass. soc. 20-4-2005 no 03-41.490), l’employeur devant rapporter la preuve de l’événement constitutif du terme du contrat et de sa date (Cass. soc. 13-5-2003 no 01-40.809). Si le CDD se poursuit après l’échéance du terme, il devient un contrat à durée indéterminée (C. trav. art. L. 1243-11).

A noter : Si le CDD doit en principe prendre fin le jour-même de l’évènement constitutif du terme, on notera toutefois que la Cour a accordé à l’employeur, dans un cas où le salarié remplacé était décédé, un délai « raisonnable » d’information du salarié remplaçant, le recours à ce délai n’ayant pas pour effet d’entraîner un dépassement du terme du CDD (Cass. soc. 4-2-2009 no 07-42.954).

En l’espèce, un CDD avait été conclu en 2012 pour pourvoir au remplacement d’un salarié absent pour maladie. Le 10 décembre 2014, ce dernier était licencié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement. Le même jour, son remplaçant adressait à l’employeur un courriel indiquant qu’il avait reçu un appel téléphonique du directeur régional lui annonçant la fin de son contrat, qu’une telle pratique était illégale et qu’il demandait une confirmation écrite de la fin de son contrat. Le 11 décembre 2014, l’employeur annonçait à l’intéressé qu’en raison du licenciement le 10 décembre 2014 du salarié absent, son CDD avait pris fin à cette date. Le salarié ainsi évincé a alors saisi la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de son CDD en contrat à durée indéterminée en soutenant que son contrat s’était poursuivi après l’échéance de son terme _il était en effet venu travailler le 11 décembre_, ainsi qu’une indemnisation au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement du conseil de prud’hommes, qui lui donne raison en considérant que l’employeur, ayant notifié la fin du contrat le 11 décembre 2014, celui-ci s’est poursuivi après son terme, est infirmé par la cour d’appel. Relevant que les dispositions relatives au CDD de remplacement ne prévoient pas les modalités d’information du salarié sur le terme de son contrat et n’exigent ainsi pas de notification écrite, celle-ci décide que le remplaçant avait été valablement informé sur ce point par téléphone le 10 décembre 2014. 

Saisie par le salarié, la chambre sociale de la Cour de cassation approuve la décision de la cour d’appel. Pour elle, si, en application de l’article L 1242-7 du Code du travail, le CDD conclu pour remplacer un salarié absent a pour terme la fin de l’absence du salarié, il n’est pas exigé que l’employeur y mette fin par écrit.

La Cour réaffirme donc, tout d’abord, le principe suivant lequel le CDD de remplacement prend fin au moment où s’achève l’absence du salarié remplacé.

Elle refuse ensuite, dans le silence des textes, de créer à la charge de l’employeur une obligation de notification écrite au salarié sous CDD de remplacement qui seule aurait pour effet de valablement mettre fin au contrat. L’information sur l’événement constitutif de la fin du CDD, à laquelle l’employeur peut se livrer pour éviter que le salarié n’exécute une prestation de travail au-delà du terme du contrat _ et qui en l’espèce était particulièrement nécessaire car le salarié exécutait sa prestation de travail hors les murs de l’entreprise _ n’a à revêtir aucune forme particulière.

Pour rejeter le pourvoi, la Haute Cour s’appuie sur les constatations des juges du fond qui ont retenu que la fin de l’absence du salarié remplacé était intervenue le 10 décembre 2014, date de son licenciement, ce dont son remplaçant avait été informé le jour-même. En conséquence, le CDD n’avait pas pu se poursuivre du fait de la présence du salarié de son propre chef sur son lieu de travail le lendemain du terme du contrat, en méconnaissance de l’appel téléphonique de l’employeur.

A noter : Si le délai restreint dans lequel l’information sur l’événement constitutif de la fin du CDD est donnée ne peut pas donner lieu pour le salarié, dont le CDD prend ainsi fin, à une requalification du contrat de travail, elle pourrait en revanche éventuellement lui ouvrir droit à des dommages-intérêts en cas de faute et préjudice avéré.