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Faute pénale intentionnelle du dirigeant : un acte personnel dont il doit assumer seul les conséquences

Cass. com. 18-9-2019 n° 16-26.962

La faute pénale intentionnelle commise par un dirigeant, même dans le cadre de ses fonctions, est par essence détachable de celles-ci et constitue un acte personnel dont il doit assumer seul les conséquences.

Le gérant d’une société en nom collectif (SNC), reconnu coupable de complicité d’abus de biens sociaux au préjudice d’une société tierce, est condamné à payer des dommages-intérêts à celle-ci. Soutenant avoir agi au nom et pour le compte de la SNC, il lui réclame le remboursement des sommes ainsi versées.

Sa demande est rejetée : le gérant avait été définitivement jugé coupable de complicité d’abus de biens sociaux et cette faute impliquait un usage illicite des biens de la société qu’il dirige, consistant à rémunérer des commissions occultes avec le patrimoine de cette dernière. La faute pénale intentionnelle du gérant est par essence détachable de ses fonctions, peu important qu’elle ait été commise dans le cadre de celles-ci.
En conséquence, le gérant ne pouvait pas se retourner contre la SNC pour lui faire supporter les conséquences de cette faute qui est un acte personnel, que ce soit vis-à-vis des tiers ou de la société au nom de laquelle il avait cru devoir agir.

A noter : A l’égard des tiers, la responsabilité civile des dirigeants ne peut être engagée que s’ils ont commis une faute séparable de leurs fonctions qui leur est imputable personnellement (notamment, Cass. com. 27-1-1998 no 313 ; Cass. com. 12-1-1999 no 91 ; Cass. com. 20-5-2003 no 851). La Cour de cassation a posé pour principe qu’une infraction pénale intentionnelle est, comme telle, séparable des fonctions du dirigeant (Cass. com. 28-9-2010 no 09-66.255 ; Cass. com. 9-12-2014 no 13-26.398). Ce principe, dégagé dans l’intérêt des tiers victimes des agissements du dirigeant, est ici étendu aux rapports entre la société et son dirigeant. Le constat d’une faute pénale intentionnelle, acte personnel du dirigeant, emporte donc deux conséquences :

  • envers les tiers, le dirigeant engage sa responsabilité civile ;
  • envers la société, il doit assumer personnellement les conséquences de sa faute sans possibilité de se retourner contre elle, même si l’acte fautif a été commis dans le cadre de ses fonctions. Il avait déjà été jugé, dans le cas d’actions engagées par des tiers, que la responsabilité personnelle du dirigeant pouvait être retenue même s’il n’avait pas excédé les limites de ses attributions (Cass. com. 10-2-2009 no 07-20.445 ; Cass. com. 18-6-2013 no 12-17.195).