Une décision de l’assemblée générale n’exonère pas un dirigeant de sa responsabilité
Cass. com. 8 mars 2016 n°14-16.621
Le dirigeant qui a fait approuver par l’assemblée générale la cession du fonds de commerce de la société à un prix inférieur à sa valeur ne peut pas échapper à sa responsabilité en invoquant cette décision collective.
Une société anonyme avait cédé son fonds de commerce à un prix qu’un actionnaire minoritaire prétendait dérisoire. Poursuivi en réparation du préjudice subi par la société, son dirigeant avait fait valoir que la cession avait été autorisée par une assemblée générale.
Son argument a été rejeté. Aucune décision de l’assemblée générale ne peut avoir pour effet d’éteindre une action en responsabilité contre les administrateurs ou contre le directeur général d’une société anonyme pour faute commise dans l’accomplissement de son mandat (C. com. art. L 225-253, al. 2). En l’espèce, le dirigeant, qui avait préparé le projet de cession du fonds soumis à l’assemblée générale, avait agi avec une légèreté blâmable envers la société en acceptant un prix très inférieur à sa valeur, sans justifier de la recherche d’un acquéreur à un meilleur prix, ni de la méthode de détermination de ce prix.
A noter : Lorsque la faute du dirigeant d’une société cause un préjudice à celle-ci, des règles spéciales tendent à assurer le libre exercice de l’action en responsabilité que peuvent exercer contre lui les représentants légaux de la société ou un associé ou actionnaire.
D'une part, est réputée non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de subordonner l'exercice de l'action sociale à l'avis préalable ou à l'autorisation de l'assemblée générale, ou qui comporterait par avance renonciation à l'exercice de cette action (C. com. art. L 223-22, al. 4 pour les SARL et L 225-253, al. 1 pour les SA classiques, et, sur renvoi des articles L 225-256, al. 1 et L 225-257, al. 2 pour les SA à directoire, sur renvoi de l'article L 226-1, al. 2, pour les SCA et, sur renvoi de l'article L 227-8, pour les SAS ; C. civ. art. 1843-5, al. 2 pour les autres sociétés commerciales et les sociétés civiles).
D'autre part, aucune décision de l'assemblée des associés ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les dirigeants de droit pour faute commise dans l'accomplissement de leur mandat (C. com. art. L 225-253, al. 2 pour les SARL et L 225-253, al. 2 pour les SA classiques et sur renvoi des articles précités pour les autres sociétés par actions ; C. civ. art. 1843-5, al. 3 pour les autre sociétés commerciales et les sociétés civiles).
Cette seconde règle donne rarement lieu à application. En l'espèce, l'assemblée générale de la société avait « approuvé et autorisé » la vente du fonds pour le prix auquel il avait été en définitive cédé et elle avait donné tous pouvoirs au dirigeant à l’effet de négocier et souscrire tout acte de cession portant sur le fonds et recevoir le prix correspondant. Le dirigeant aurait, à notre avis, également engagé sa responsabilité s'il n'avait pas exécuté cette décision, alors même qu'elle ne relevait pas de la compétence des associés puisqu’elle n’emportait pas extinction de l’objet social. En définitive, faire appel aux associés pour approuver la cession envisagée était, au mieux, inutile, au pire, dangereux.