Une promesse unilatérale de vente dans un contrat de location-gérance doit être enregistrée
Cass. com. 2 février 2016 n°14-24.299
La promesse unilatérale de vente d’un fonds de commerce insérée dans le contrat par lequel le propriétaire le donne en location-gérance n’échappe à l’enregistrement qu’en cas d’interdépendance des obligations des deux parties.
Est nulle toute promesse unilatérale de vente d’un fonds de commerce si elle n'est pas constatée par un acte authentique ou par un acte sous seing privé enregistré dans le délai de dix jours à compter de la date de son acceptation par le bénéficiaire (C. civ. art. 1589-2).
Des époux avaient donné leur fonds de commerce en location-gérance à une société avec promesse de vente du fonds enregistrée au prix d’environ 457 000 €. Cette dernière avait levé l'option à ce prix, mais les époux s’étaient prévalus d'un avenant portant le prix de vente à près de 610 000 € ; la société avait demandé l’annulation de l'avenant contenant la promesse unilatérale de vente faute d'enregistrement, et demandé à être déclarée propriétaire du fonds au prix de 457 000 €.
La cour d’appel de Paris avait déduit de l’argumentation suivante que l’avenant échappait à l’obligation d’enregistrement et que la levée de l'option au prix de 457 000 € était inefficace : la promesse initiale de vente, incluse dans un ensemble d'obligations réciproques des parties concernant le contrat de location-gérance, n'était pas soumise à la formalité de l'enregistrement et l'avenant, s'il modifiait de manière substantielle la promesse initiale en fixant un autre prix de vente, modifiait également les obligations des parties en prévoyant une augmentation du montant de la redevance. Il existait donc un lien entre les nouvelles obligations et le nouveau prix définis dans l'avenant.
Censure de la Cour de cassation : seul le lien de dépendance entre les obligations réciproques des parties résultant de la location-gérance et de la promesse unilatérale de vente est de nature à faire échapper cette dernière à l'obligation d'enregistrement. Or les juges du fond n’avaient pas suffisamment caractérisé ce lien.
A noter : Aux termes de l’article 1589-2 du Code civil (CGI art. 1840-A ancien), seules les promesses unilatérales de vente doivent être enregistrées. La Cour de cassation considère que la promesse perd son caractère unilatéral non seulement lorsque le bénéficiaire de la promesse s'oblige lui aussi à acheter (promesse synallagmatique), mais également lorsque la promesse stipule, à la charge du bénéficiaire, d'autres obligations que celle d'acheter. Ainsi, échappe à la formalité de l'enregistrement la promesse de vente insérée dans un ensemble contractuel comportant des obligations réciproques (Cass. 3e civ. 3-11-1981 ; Cass. 3e civ. 5-7-1995 n° 1505), à condition cependant qu'il existe un lien de dépendance nécessaire entre ces diverses obligations (Cass. ass. plén. 24-2-2006 n° 04-20.525 pour une promesse unilatérale intégrée dans une transaction). Pour que les obligations réciproques fassent perdre à la promesse son caractère unilatéral, il faut en effet qu'elles soient de nature à contraindre le bénéficiaire à lever l'option (Cass. 3e civ. 31-1-2001 n° 184 ; Cass. com. 15-1-2002 n° 99-10.362).
La Cour de cassation fait ici application de cette jurisprudence dans un cas où la promesse de vente du fonds de commerce avait été consentie lors de la mise en location-gérance du fonds. Le bénéficiaire devait certes payer une redevance, mais cette obligation, si elle était la contrepartie de la mise en jouissance du bien, n'était pas celle de l'engagement pris par le promettant de vendre le bien. On était donc bien en présence d'une promesse unilatérale.