Acte de gestion courante que le débiteur peut valablement effectuer seul. Illustration
Cass. com. 13-12-2017 n° 16-18.244 1484
Constituent des actes de gestion courante qu’un débiteur peut passer seul sans l’assistance de l’administrateur les commandes de fournitures en lien avec son activité et qui sont habituelles dans leur nombre et montant.
Une entreprise est mise sous sauvegarde, puis en redressement judiciaire. L'un de ses fournisseurs lui réclame le paiement de 173 commandes passées après l’ouverture de la procédure collective pendant la période d’observation. L'entreprise fait valoir que, si les actes de gestion courante accomplis par le débiteur seul sont valables à l’égard des tiers de bonne foi (C. com. art. L 622-3), les commandes effectuées pour un montant de 117 000 € sans l’autorisation de l’administrateur judiciaire qui avait été chargé de l’assister dépassaient la gestion courante.
Son argument est rejeté. Les commandes, en lien avec l’activité commerciale de l'entreprise et présentant un caractère habituel de par leur nombre et leur coût moyens, constituaient des actes de gestion courante : l'entreprise, qui exerçait son activité dans le secteur des transports routiers, avait passé les commandes de matériel auprès d'un tiers, spécialisé dans la fourniture d’équipements de transport ; ces commandes, correspondant à des prestations réalisées après le redressement judiciaire, étaient nécessaires à la poursuite de l'activité de l'entreprise.
A noter : 1° La notion d’actes de gestion courante n’est pas définie par la loi. Il résulte de la jurisprudence que cette qualification est réservée aux opérations habituelles et présentant un lien avec l’activité professionnelle du débiteur. Par exemple, sont des actes de gestion courante des commandes passées par le débiteur pour les besoins de son activité pendant la période d’observation (Cass. com. 11-6-1996 précité), la vente d’appartements pour une société de construction immobilière (Cass. com. 27-11-2001 n° 99-10.378), la conclusion d'un contrat de transport en vue d'acheminer les marchandises fabriquées auprès des clients, cet acheminement constituant une activité quotidienne du débiteur (Cass. com. 9-1-2001 n° 98-10.876) ou encore le fait d’émettre, pour un marché de plusieurs millions, une lettre de change de 60 000 € sur un client pour une société spécialisée dans les travaux de construction et employant plus de cent salariés (Cass. com. 13-9-2011 n° 10-24.126). En revanche, n’ont été considérés comme des actes de gestion courante ni la conclusion d’un bail précaire par un débiteur exerçant une activité de fabrication de meubles (Cass. com. 29-9-2015 n° 14-17.374) ni le mandat donné à un avocat compte tenu l’importance, de la nature et du coût des diligences accomplies (Cass. com. 30-3-2010 n° 09-10.729).
2° L’acte passé seul par le débiteur sans satisfaire aux conditions posées par l’article L 622-3 n’est pas nul mais inopposable à la procédure collective (notamment, Cass. soc. 5-11-2014 n° 13-19.662), de sorte le cocontractant ne peut pas être payé dans le cadre de celle-ci. En revanche, si l’acte répond à ces conditions, les créances qui en découlent, nées régulièrement pendant la période d’observation pour les besoins de celle-ci ou du déroulement de la procédure ou de la période d'observation ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, doivent être payées à leur échéance ou par priorité à la plupart des autres créances (C. com. art. L 622-17).