L'atteinte à l'intérêt social ne justifie pas la nomination d'un administrateur provisoire
Cass. com. 29 septembre 2015 n° 14-11.491
La désignation d’un administrateur provisoire se justifie par des circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d’un péril imminent. Des actes de concurrence déloyale ne constituent pas de telles circonstances.
L'associé minoritaire d'une SARL demandait en justice la nomination d'un administrateur provisoire chargé de gérer la société dont l'intérêt était, soutenait-il, menacé par les actes de concurrence déloyale que le gérant aurait commis au préjudice de la société (création d'une société concurrente qui utilisait la ligne téléphonique de la SARL ; existence de flux financiers anormaux entre ces sociétés).
Cette demande a été écartée : la désignation judiciaire d’un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle qui suppose rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d’un péril imminent ; or, les irrégularités relevées par l'associé ne caractérisaient pas une paralysie des organes de gestion.
A noter : Rappel d'un principe établi (notamment, Cass. com. 25-9-2007 n° 06-20.320 ; Cass. com. 18-5-2010 n° 09-14.838).
La désignation d'un administrateur provisoire a certes été admise dans des cas où le fonctionnement de la société n'était pas paralysé au sens strict : par exemple, dans un cas où une mésentente entre associés rendait ce fonctionnement anormal et où l'annulation prévisible de la nomination des dirigeants sociaux allait entraîner de graves conséquences pour la société (Cass. com. 17-1-1989 n° 87-10.966) ; ou encore lorsque les faits reprochés au dirigeant étaient de nature à porter un préjudice irrémédiable à l'intérêt social et qu'ils induisaient une suspicion qui bloquait son administration (Cass. com. 17-10-1989 n° 87-19.369). Mais les circonstances relevées dans ces affaires laissaient craindre une paralysie prochaine de la société.
Rien de tel n'était relevé dans les agissements reprochés au gérant, constitutifs d'une simple concurrence déloyale. La désignation d'un administrateur a également été refusée dans une société dont l’essentiel des parts était en indivision depuis le décès des associés majoritaires et dont la vente d’un actif avait été approuvée par les autres associés représentant le reliquat – infime – du capital car aucun péril ne menaçait l'intérêt social (Cass. 3e civ. 30-6-2015 n° 13-25.685).