Demande de nullité d’une décision collective de SAS pour défaut d’information des associés
CA Paris 10 novembre 2015 n°14/23492, ch. 5-8
Le droit d’information des associés de SAS avant une assemblée est respecté si les caractéristiques de l’opération envisagée leur sont communiquées.
L’assemblée générale d’une société par actions simplifiée (SAS) avait décidé d’émettre des obligations convertibles en actions pour faire face à des difficultés de trésorerie. Un associé minoritaire avait agi en nullité de l’assemblée pour non-respect des conditions de convocation des associés : la convocation mentionnait le projet d'émission, l'ordre du jour étant accompagné d'une formule de pouvoir, du rapport du président et du texte des projets de résolution qui précisaient le montant nominal de l'emprunt et le rapport de conversion, elle aurait dû en outre comporter l'ensemble des informations exigées selon lui par l'article R 225-120 du Code de commerce lorsqu'une émission de valeurs mobilières donnant accès au capital est susceptible d'entraîner une augmentation de celui-ci, c’est-à-dire les caractéristiques de l'opération (taux d'intérêt servi, conditions de paiement des intérêts, échéance de l'emprunt, délais et conditions de conversion, prime de non-conversion, clauses d'exigibilité anticipée).
La cour d’appel de Paris a rejeté sa demande. L’article R 225-120 ne sanctionne pas de nullité l'inobservation des formalités liées à la communication aux actionnaires des documents qu'il énumère et l’associé ne rapportait pas la preuve d’un manquement de la SAS à son droit d’information. En effet, le projet de résolution communiqué avec la convocation à l'assemblée, précisait la période de souscription et renvoyait explicitement, pour les délais et conditions de conversion, au projet de contrat que l’associé avait la possibilité de réclamer avant la tenue de l'assemblée s’il n’était pas joint à l’envoi ; le projet de contrat contenait l'ensemble des caractéristiques de l'opération visées par l'article R 225-120 ; l’associé, représenté lors de l'assemblée, avait donné une indication de vote défavorable sur l'émission de l'emprunt, mais n’avait exprimé aucune réserve sur le caractère insuffisant des informations auxquelles il avait eu accès ; il reconnaissait ne pas avoir été dans une situation financière lui permettant de souscrire aux obligations convertibles émises et il n’établissait donc aucun préjudice de ce fait ; enfin, la résolution en cause avait été adoptée à une majorité supérieure à 84 %.
A noter : Les associés de SAS doivent être mis en mesure d'exercer leurs pouvoirs en pleine connaissance de cause, ce qui impose notamment de les informer sur les sujets faisant l'objet de décisions collectives afin qu'ils puissent exprimer un choix éclairé (CA Limoges 28-3-2012 n° 10/00576). Les statuts ou, à défaut, les dirigeants sociaux doivent mettre en place les moyens les plus appropriés à la prise de décision, le cas échéant en s'inspirant des règles de la SA relatives au droit de communication préalable. Ainsi, les dirigeants et les commissaires aux comptes, si la SAS en est dotée, doivent présenter un rapport aux associés appelés à statuer sur des augmentations de capital différées (émission de valeurs mobilières donnant accès au capital ; C. com. art. L 228-92 sur renvoi de l’article L 227-1).
Dans cette affaire, l’associé ne pouvait pas, à notre avis, se fonder sur le non-respect de l’article R 225-120 du Code de commerce pour obtenir l’annulation de la résolution. En effet, l’avis qui doit être adressé aux actionnaires, selon cet article, prend place chronologiquement au moment de la réalisation de l’augmentation de capital et non au moment de la décision de l’augmenter et il doit simplement mentionner les principales caractéristiques des valeurs mobilières.