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Quand déléguer ses pouvoirs ne protège pas d’une condamnation pour délit d’entrave

Cass. crim. 15-3-2016 n°14-85.078

L’employeur poursuivi pour délit d’entrave ne peut pas, pour s’exonérer de sa responsabilité, invoquer la délégation de pouvoirs donnée à un subordonné s’il est lui-même l’auteur des actes reprochés.

En l'espèce, le président d’une société, qui avait informé et consulté son comité d'entreprise sur un projet de déménagement alors que le bail avait déjà été dénoncé, était poursuivi pour délit d’entrave au fonctionnement de cette instance. Il prétendait toutefois s'exonéner de sa responsabilité en faisant valoir qu'il avait donné une délégation de pouvoirs au directeur des relations sociales.

La cour d'appel avait jugé qu'il ne pouvait pas invoquer cette délégation, dès lors qu’il présidait lui-même les réunions du comité d'entreprise et qu’il résultait de ses réponses aux questions posées lors de l’une de ces réunions qu’il avait omis sciemment de consulter préalablement les institutions représentatives du personnel. Elle l'avait donc condamné.

Avec raison, pour la chambre criminelle de la Cour de cassation.

A noter : Cette décision constitue une double confirmation de jurisprudence :
- tout d’abord, si le chef d’entreprise peut s’exonérer de sa responsabilité pénale pour entrave lorsqu’il a délégué ses pouvoirs à un tiers en matière de représentation du personnel, la délégation consentie ne l’exonère pas de sa responsabilité pour les actes commis personnellement  ;

- en second lieu, dès lors qu’il avait sciemment omis de consulter préalablement le comité d’entreprise, le délit d’entrave était constitué, à la fois dans son élément matériel et dans son élément moral ; rappelons en effet, sur ce dernier point, que l’élément moral du délit d’entrave réside dans le caractère intentionnel de l'agissement répréhensible, qui lui-même, pour la chambre criminelle de la Cour de cassation, découle du caractère volontaire de cet agissement (Cass. crim. 23-1-1979 no78-92.407 ; Cass. crim. 15-2-1994 no 92-84.088 ; Cass. crim. 12-4-2016 n° 15-80.772).