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Des conditions générales de vente non signées par le client lui ont été déclarées inopposables

CA Versailles 3 mai 2016 n° 15/02478, ch. 12

Les conditions générales de vente d’un prestataire de services ont été déclarées inopposables à son client qui ne les avait pas signées, le contrat s’y référant de manière accessoire et n’indiquant pas qu’elles lui avaient été remises et qu’il les avait acceptées.

Une entreprise avait résilié avant terme un contrat qu'elle avait conclu avec un prestataire de services d'hébergement sur internet. Ce dernier avait soutenu que les modalités de résiliation anticipée du contrat figurant dans ses conditions générales de vente (CGV) étaient opposables à l’entreprise. Il invoquait le fait que le contrat précisait « En complément des définitions des Conditions Générales de Vente et des Conditions Particulières Hébergement, les termes suivants utilisés dans les présentes conditions particulières auront la signification qui suit (...) » pour affirmer que l’entreprise avait nécessairement eu connaissance des CGV.

La cour d’appel de Versailles a, au contraire, jugé que les CGV du prestataire était inopposables à l’entreprise : elles n’étaient ni signées, ni paraphées par l’entreprise et n’étaient évoquées que de manière tout à fait accessoire dans le contrat ; ce dernier ne précisait à aucun moment qu'elles avaient été remises à l’entreprise, que celle-ci en avait pris connaissance, les avait acceptées et que ces CGV faisaient ainsi partie intégrante de la relation contractuelle ; peu importait à cet égard la prétendue qualité de professionnelle avertie de l'entreprise.

À noter : Les conditions générales d’une partie n’entrent dans le champ contractuel que si elles ont été connues et acceptées par l’autre partie, au plus tard au moment de la formation du contrat (Cass. com. 28-4-1998 n° 95-20.290 ). 
Cette connaissance et cette acceptation des CVG ont été déduites :

  • du fait que l’autre partie avait signé un document faisant expressément référence aux CGV qui lui avaient été remises (Cass. 1e civ. 3-3-1981 n° 79-16.323 ; voir aussi Cass. 1eciv. 27-2-2013 n° 11-23.520 ) ou qui étaient accessibles sur internet (CA Montpellier 1-3-2011 n° 10/00867) ;
  • des relations d’affaires suivies existant entre les parties lorsque celles-ci sont des professionnels (Cass. com. 11-10-2005 n° 97-14.072 ; CA Montpellier 1-3-2011 précité), cette circonstance étant inopérante lorsque les CVG sont opposées à un particulier (Cass. 1e civ. 11-3-2014 n° 12-28.304).

Dans l’affaire ci-dessus, il n’existait pas de relations antérieures entre les parties et rien n’établissait que les CGV auxquelles le contrat faisait référence avaient été communiquées à l’entreprise.

La jurisprudence récente de la cour d’appel de Versailles n'est guère uniforme. Ainsi, elle a écarté les conditions générales d’un transporteur, jointes au contrat signé par le client et reprises dans le guide fourni à ce dernier et accessibles sur le site internet du transporteur dès lors qu’elles n’avaient pas été signées par le client (CA Versailles 25-11-2014 n° 12/03975). A l’inverse, elle a retenu l’opposabilité de conditions générales qui figuraient sur un ordre de réparation adressé par un client, jugeant qu’en exécutant les travaux demandés, le réparateur avait nécessairement accepté ces conditions (CA Versailles 14-5-2013 n° 12/08680).

En pratique, on ne saurait trop conseiller aux professionnels de se ménager la preuve de la connaissance et de l'acceptation de leurs CVG par leurs clients (annexion au contrat, case à cocher au pied du contrat attestant la prise de connaissance et l'acceptation, etc.).

La réforme du droit des contrats et des obligations, qui s’appliquera aux contrats conclus à partir du 1er octobre 2016, ne remet pas en cause la jurisprudence majoritaire. Aux termes du nouvel article 1119 du Code civil, les conditions générales invoquées par une partie n'ont d'effet à l'égard de l'autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées. Il incombera donc comme auparavant aux juges d'apprécier si ces conditions sont remplies.