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La règle « Peps » s’applique au calcul de la plus-value d’une cession de parts numérotées

CE 8-6-2016 n° 381289

La cession de parts d'une société de personnes est réputée porter en priorité sur les plus anciennes alors même que les parts sont numérotées. Cette solution inédite du Conseil d'Etat est applicable aux cessions de titres concernées par la règle « Peps ».

1. Dans le cadre d’une cession de titres d’une société de personnes, le présent arrêt du Conseil d’Etat tranche la question de l’interprétation des dispositions prévues à l’article 39 duodecies, 6 du CGI qui prévoient que les cessions de titres compris dans le portefeuille sont réputées porter par priorité sur les titres de même nature acquis ou souscrits à la date la plus ancienne (règle « Peps » ou « Fifo »). Il applique strictement ces dispositions.

Rendue dans le cadre d'une cession de parts de société de personnes, cette solution inédite peut concerner les autres cessions de titres.

La règle « Peps » prévue par le texte légal...

2. La question posée en l’espèce est de savoir si la règle prévue à l’article 39 duodecies, 6 du CGI doit s’appliquer dans le cas où le contribuable apporte la preuve que les parts cédées ne sont pas celles qui ont été acquises en premier, c’est-à-dire lorsque l’acte de cession retrace les origines des titres et détaille les parts cédées.

Les faits sont les suivants : un contribuable possède des titres de la société de personnes dans laquelle il exerce son activité. Il en acquiert de nouveaux qu’il cède le jour même. De sorte qu’il soutient ne pas avoir réalisé de plus-value. En revanche, l’administration considère, sur le fondement du texte légal précité, que la règle « Peps » s’applique et que, par suite, la cession a porté sur les parts les plus anciennes. Selon elle, la cession doit donc donner lieu à une plus-value imposable à l’impôt sur le revenu selon le régime des plus-values à long terme.

La cour administrative d’appel de Nancy a tranché en faveur de l’administration (CAA Nancy 17-4-2014 n° 12NC01928). Le Conseil d’Etat confirme cette décision.

...s'applique même en cas de numérotation des parts cédées

3. La Haute Juridiction juge que la règle prévue à l’article 39 duodecies, 6 du CGI doit s’appliquer sans que la numérotation des parts cédées puisse y faire obstacle, alors même qu’il est ainsi possible d’établir la date exacte d’acquisition et le coût réel de chacun des titres cédés.

Comme le relève le rapporteur public dans ses conclusions, le texte légal est clair. L’interprétation du contribuable ne peut être retenue, dès lors que le législateur n’a pas recouru au terme « présumées » mais « réputées ».

Se référant aux travaux préparatoires de la loi, il ne relève aucun élément qui permettrait de considérer que la règle « Peps » serait une règle de calcul subsidiaire qui pourrait notamment s’appliquer dans le cas où la date d’acquisition des titres cédés ne peut être déterminée avec certitude. De même, l’article 38 octies de l’annexe III au CGI, qui reprend cette règle pour la préciser, ne prévoit pas d’exception.

4. Le rapporteur public souligne également que si le choix du législateur peut apparaître sévère il y a aussi une certaine logique à traiter comme un tout indissociable l’ensemble des titres de même nature. Ce principe n’est pas incompatible avec la règle fixée par la jurisprudence Quemener qui a notamment jugé qu'en cas de cession de parts acquises ou souscrites à des dates différentes, le mécanisme de correction du prix de revient de ces parts doit être appliqué distinctement pour chaque lot de titres acquis (ou souscrits) à la même date (CE 16-2-2000 n° 133296). La présente solution peut d’ailleurs être favorable au contribuable dans le cas où les titres évoluent à la baisse et elle facilite aussi l’application du régime des plus-values à long-terme.