L’indemnité de résiliation d’un contrat de location de matériel constitue une clause pénale
CA Versailles 13e ch. 15-9-2016 n° 14/07916
L'indemnité de résiliation d'un contrat de location de matériel, égale à la totalité des loyers restant à courir majorés des loyers échus impayés et des intérêts est une clause pénale manifestement excessive, compte tenu du préjudice réellement subi par le propriétaire.
Un contrat de location de matériel, portant notamment sur des terminaux mobiles de paiement par carte bleue, avait été conclu pour un loyer mensuel de 3 090 € HT et une durée de 55 mois. Il prévoyait une indemnité de résiliation égale à la totalité des loyers restant à courir majorés des loyers échus impayés et des intérêts à dater du jour de la résiliation.
Le locataire ayant résilié le contrat au bout de 18 mois, le bailleur lui avait réclamé une indemnité de 113 800 €.
Après avoir rappelé que la disproportion manifeste de la clause pénale s'apprécie en comparant le montant de la peine conventionnellement fixé et celui du préjudice effectivement subi, la cour d'appel de Versailles a jugé que cette indemnité était manifestement excessive au regard du préjudice effectivement subi par le bailleur : ce dernier avait dépensé environ 150 000 € pour acheter le matériel et avait encaissé 55 620 € au titre des loyers, de sorte que l'exécution révélait un solde d'environ 94 350 € en sa défaveur ; la valeur de revente du matériel, qui n'avait été utilisé que 18 mois, était d'environ 69 000 € et le bailleur faisait valoir en vain qu'il ne l'avait pas récupéré, le défaut de récupération lui étant entièrement imputable.
Par suite, la cour a réduit l'indemnité à 50 000 €.
A noter : Le juge peut réviser le montant de la clause pénale s'il est manifestement excessif ou dérisoire (C. civ. art. 1152, al. 2 ancien ; désormais, art. 1231-5). La disproportion s'apprécie à la date où le juge statue (Cass. 1e civ. 19-3-1980 n° 78-13.151), au regard du préjudice subi par le bénéficiaire de la clause (Cass. com. 14-10-2008 n° 07-17.542), en fonction des circonstances. Par exemple, dans le cas d'un crédit-bail de matériel conclu pour cinq ans et résilié au bout d'une année, l'indemnité de résiliation fixée au montant des loyers à échoir a été jugée disproportionnée par rapport au préjudice subi par le crédit-bailleur auquel le matériel a été restitué (CA Paris 27-1-2015 n° 13/24781).
Une fois la disproportion établie, le juge fixe souverainement le montant de l'indemnité due sans être tenu de le limiter à celui du préjudice réellement subi (Cass. 1e civ. 8-6-2004 n° 00-15.497).
La décision commentée fournit une illustration de ces principes, qui ne sont pas remis en cause par la réforme du droit des contrats opérée par l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016.