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Rupture de relations établies avec des sociétés d’un groupe : le préavis s’apprécie individuellement

Cass. com. 6 octobre 2015 n° 14-19.499 (n° 872 FS-PB), Sté Toyota Industrial Equipment c/ Sté Fonderie GM Bouhyer

Le chiffre d’affaires global réalisé par une entreprise avec plusieurs sociétés appartenant à un groupe et ayant entretenu des relations distinctes n’est pas pris en compte pour apprécier la durée du préavis dû en cas de rupture des relations commerciales.

La rupture brutale d’une relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte notamment de la durée de la relation entraîne la responsabilité civile de son auteur (C. com. art. L 442-6, I-5°).

Deux sociétés appartenant à un groupe industriel avaient rompu sans préavis, l’une en juin l’autre en octobre, leurs relations avec un fournisseur qui les approvisionnait depuis cinq ans. La cour d’appel de Paris avait estimé que celui-ci avait droit à un préavis de rupture d’un an compte tenu des circonstances suivantes : les sociétés avaient noué concomitamment des relations commerciales avec lui et les avaient rompues la même année pour des motifs similaires ; ces ruptures cumulées avaient nécessairement amplifié les conséquences qui en résultait pour le fournisseur ; la durée du préavis devait donc être appréciée en tenant compte du chiffre d’affaires global réalisé par le fournisseur avec ces sociétés qui avaient entretenu avec celui-ci une relation commerciale sur une même période, sur des produits identiques et des quantités similaires ; ce chiffre d’affaires avait atteint environ 10 % et le fournisseur avait dû, sur une même période, pallier la perte de deux clients avec lesquels il avait un chiffre d’affaires conséquent.

La Haute Juridiction a cassé cette décision. Bien qu'appartenant à un même groupe et ayant la même activité les sociétés étaient deux sociétés autonomes qui avaient entretenu avec le fournisseur des relations commerciales distinctes. Il n’était pas établi qu’elles avaient agi de concert.

A noter : La Cour de cassation précise sa jurisprudence en cas de relations nouées par une même entreprise avec plusieurs sociétés d’un même groupe. Elle a déjà jugé que la durée du préavis nécessaire pour rompre l’une de ces relations s’apprécie par référence à la seule durée de celle-ci, sans tenir compte de la durée des autres relations (Cass. com. 31-3-2015 n° 14-11.329 ; dans le même sens, Cass. com. 23-10-2012 n° 11-22.383). Ici, la durée des relations entretenues avec les deux sociétés était identique, mais le fournisseur invoquait une prise en compte globale du volume d’activité perdu. 
Les sociétés appartenant à un groupe sont des personnes morales autonomes, y compris à l’égard de la société mère (notamment, Cass. com. 26-4-1994 n° 92-15.577 ; CA Montpellier 14-12-2010 n° 09-6383). Les relations commerciales établies par une entreprise avec plusieurs sociétés d’un même groupe doivent donc être appréciées individuellement et non globalement. 
La Cour de cassation réserve pour la première fois l’hypothèse où ces sociétés ont agi de concert. Il résulte de la décision commentée que la preuve d’un tel concert ne peut pas résulter de seules similitudes dans les relations nouées et dans les circonstances de leur rupture.