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Que risque une société déficitaire sans commissaire aux comptes à se transformer en société par actions ?

Bull. CNCC septembre 2015 p. 440

Lorsqu'une société sans commissaire aux comptes se transforme en société par actions, la transformation ne peut pas être annulée dès lors que les associés ont approuvé l'évaluation des biens sociaux et ce, même si les capitaux propres sont inférieurs au capital social.

Lorsqu'une société sans commissaire aux comptes se transforme en société par actions, un ou plusieurs commissaires à la transformation doivent être désignés pour apprécier la valeur des biens composant l'actif social (C. com. art. L 224-3, al. 1). Leur rapport atteste que le montant des capitaux propres est au moins égal au capital social (art. R 224-3).

La transformation est-elle néanmoins valable si le rapport atteste que, du fait des pertes enregistrées, le montant des capitaux propres est inférieur au capital social ?

La Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) a répondu par l'affirmative en se fondant sur l'argumentation suivante.

La nullité de la transformation ne peut résulter que d'une disposition expresse du Code de commerce sur les sociétés commerciales ou des lois qui régissent la nullité des contrats (C. com. art. L 235-1, al. 1). Or, l'article L 224-3, al. 2 et 3 prévoit seulement que les associés statuent sur l'évaluation des biens et qu'à défaut « d'approbation expresse des associés » la transformation est nulle.

Il résulte de la stricte interprétation de ce texte que la nullité est encourue lorsque les associés n'ont pas approuvé cette évaluation et non pas, en cas d'approbation, lorsque le résultat de l'évaluation fait apparaître des capitaux propres inférieurs au capital social. En effet, l'article L 224-3 exige l'approbation de l'évaluation mais n'impose pas une obligation de résultat en terme de montant ou de ratio.

La CNCC ajoute, au soutien de cette analyse, que le texte ne soumet pas le rapport du commissaire à la transformation à l'approbation des associés.

A noter : Comme le souligne la CNCC, la transformation d'une société en perte dont l'évaluation des biens a été approuvée n'encourt pas la nullité mais n'en reste pas moins irrégulière car réalisée sans que le rapport du commissaire atteste que le montant des capitaux propres est au moins égal au capital social. 
D'ailleurs, elle n'est pas sans risque. Le greffier du tribunal de commerce, tenu de vérifier que la transformation est conforme aux dispositions législatives et réglementaires qui la régissent (C. com. art. R 123-95, al. 2), serait, à notre avis, fondé à refuser de l'inscrire au registre du commerce et des sociétés.
En outre, les dirigeants ayant proposé la transformation et les associés l'ayant approuvée engageraient leur responsabilité si un associé opposé à la transformation ou un créancier social établissait que cette irrégularité lui a porté préjudice.