Taxation des dons manuels lors des opérations de contrôle
Cass. com. 6-12-2016 n° 15-19.966
La Cour de cassation clôt le débat sur la révélation des dons manuels. La découverte d'un tel don lors d'une vérification de comptabilité - même consécutive à la réponse apportée par le contribuable à une question de l'administration - n'est pas une révélation.
Les dons manuels deviennent taxables notamment en cas de révélation par le donataire à l’administration fiscale (CGI art. 757, al. 2). Toute la question est de savoir ce qu’il faut entendre par « révélation ».
Sans refaire l'historique complet de cette question qui a fait couler beaucoup d'encre, rappelons que l'administration fiscale considère que la découverte d'un don manuel lors d'une vérification de comptabilité constitue une révélation du don (BOI-ENR-DMTG-20-10-20-10 n° 60). Cette acception élargie de la révélation, entendue au sens de révélation subie, a été celle retenue par la jurisprudence (Cass. com. 5-10-2004 n° 03-15.709). Mais, en 2013, la Cour de cassation, opérant un revirement inspiré par la Cour européenne des droits de l’Homme, a décidé dans un arrêt de principe qu'une procédure de vérification de comptabilité ne peut pas fonder l'exigibilité des droits de donation, le contribuable n'ayant rien révélé volontairement à l'administration (Cass. com. 15-1-2013 n° 12-11.642). Autrement dit, la révélation doit être spontanée et non subie. Position réitérée trois mois plus tard à propos d'une personne physique (Cass. com. 16-4-2013 n° 12-17.414).
Dans l’affaire commentée, une association de diffusion de la pratique de méditation tibétaine fait l'objet d'un contrôle fiscal au cours duquel l'administration l'interroge sur la nature de certaines sommes découvertes dans sa comptabilité. L'association répond qu'il s'agit de dons manuels de ses adeptes et se voit notifier leur taxation aux droits de donation au motif qu'elle a ainsi révélé les dons litigieux à l'administration au sens de l'article 757 du CGI.
Confirmant le jugement du tribunal de grande instance de Limoges (TGI Limoges 21-10-2013 n° 12-665), la cour d'appel de la même ville (CA Limoges 26-3-2015 n° 14/00016) a considéré que la réponse de l'association à la demande de l'administration n'était pas intervenue sous la contrainte mais avait été faite spontanément. Les dons manuels en cause devaient donc selon elle être considérés comme révélés à l'administration et sont taxables.
La Cour de cassation censure l’arrêt de la cour d’appel pour violation de l’article 757 du CGI. Dans un attendu de principe, elle affirme que « la découverte d’un don manuel lors d’une vérification de comptabilité, résulterait-elle de la réponse apportée par le contribuable à une question de l’administration formée à cette occasion, ne peut constituer une révélation par le donataire au sens de l’article 757 du CGI ».
La Cour de cassation clôt ainsi le débat autour de la définition de la révélation. Les Hauts Magistrats réitèrent la solution énoncée en 2013 selon laquelle la révélation doit être volontaire et la complètent en ajoutant que la réponse du contribuable ne constitue pas une telle révélation.
Remarques
1. Jusqu’à présent, l'administration fiscale a cru devoir restreindre la portée des arrêts de la Cour de cassation de 2013, en s'appuyant sur le jugement du tribunal de grande instance de Limoges pour considérer que la découverte d'un don manuel lors d'une vérification de comptabilité vaut révélation. A la suite du présent arrêt, elle ne devrait avoir d’autre choix que de modifier sa doctrine.
2. En toute logique, la solution devrait être transposable aux personnes physiques, notamment lorsqu’elles présentent leurs relevés de comptes bancaires au cours d'un examen de situation fiscale personnelle.